C’est bien sûr avec une certaine émotion que j’écris ces quelques mots d’ouverture du dernier rapport d’activité du Conseil supérieur de l’audiovisuel, qui a cédé la place au 1er janvier 2022, après 32 ans d’existence, à l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique.
Pour préparer au mieux cette transition, la dernière année du CSA s’est avérée très riche en chantiers et en avancées concrètes. Elle nous a ainsi permis de poser des jalons essentiels pour l’avenir de la régulation.
1. Nous avons d’abord poursuivi d’importants projets dans notre activité historique de régulation des médias audiovisuels, en accompagnant la modernisation de la diffusion hertzienne et les transformations du secteur. 2021 a été une année particulièrement symbolique pour le média radio, qui a célébré pas moins de trois anniversaires : les cent ans de sa création, les 120 ans du statut associatif et les 40 ans de la libération des ondes. Le CSA a également organisé, en lien avec les opérateurs et le ministère de la culture, la première fête de la radio. Le déploiement du DAB+ a de son côté connu des progrès importants, notamment avec le déploiement à l’automne de deux multiplexes sur l’axe Paris-Lyon-Marseille. Fin 2021, 40% de la population métropolitaine était ainsi couverte par la radio numérique terrestre.
Dans le domaine de la télévision, plusieurs projets et modifications réglementaires ont marqué l’année, dans le contexte plus général de bouleversements technologiques et d’usages. Le CSA a entamé l’instruction du projet de concentration entre les groupes TF1 et M6, et suivi avec attention les opérations de changements de contrôle annoncées au sein du secteur audiovisuel. Les règles encadrant les obligations d’investissement des médias audiovisuels dans la création audiovisuelle ont été modernisées. Les décrets dits « TNT » et « cabsat », applicables aux chaînes de télévision, ont été révisés afin de les adapter aux évolutions structurelles en cours. Le régulateur a suivi de près ces réformes et rendu des avis circonstanciés sur les projets de textes concernés.
Cette modernisation a aussi, et surtout, concerné la régulation des services de médias audiovisuels à la demande (SMAD), avec la publication, le 22 juin, du décret de transposition de la directive européenne sur les services de médias audiovisuels. En application de ce nouveau cadre, le CSA a procédé au conventionnement et à la notification des obligations des principaux services de vidéo à la demande internationaux établis hors de notre territoire mais dont l’offre de cinéma et d’audiovisuel comprend le marché français, afin de les faire contribuer dès 2021. Il s’agit d’une avancée essentielle dans la modernisation du système de financement de la création.
2. Nous avons aussi, en 2021, poursuivi et renforcé notre engagement en faveur du pluralisme à l’antenne, de la liberté de communication et de la cohésion sociale. Notre vigilance a été constante pour veiller à la maîtrise de l’antenne, à la rigueur de l’information, au respect du principe de pluralisme politique et à la garantie de la liberté de communication dans les médias audiovisuels. L’année passée a notamment été marquée par les élections régionales et le référendum néo-calédonien, suivi de près par les équipes du CSA, et par la publication de notre recommandation du 6 octobre en vue de l’élection présidentielle de 2022. Nos compétences dans le domaine de la cohésion sociale se sont, de leur côté, élargies avec la loi climat et résilience du 21 août 2021, qui prévoit la conclusion sous l’égide du régulateur de chartes d’engagements volontaires des acteurs de la publicité afin de contribuer à la transition écologique.
L’action du régulateur en faveur de l’éducation aux médias et à l’information s’est également intensifiée, notamment dans les comités territoriaux de l’audiovisuel, et a donné lieu à la publication à l’automne d’un premier rapport dressant le bilan des actions des éditeurs dans ce domaine prioritaire. Enfin, nos missions de protection des publics, en particulier des plus jeunes, ont été renforcées, avec l’aboutissement du protocole sur la parentalité numérique et la mise en demeure, pour la première fois, de sites ne garantissant pas l’interdiction d’accès des mineurs aux contenus à caractère pornographique.
3. 2021 a aussi été pour nous une année pivot pour la régulation des plateformes en ligne. Le CSA a d’abord publié le deuxième bilan d’application de la loi du 22 décembre 2018 qui impose aux plateformes de contenus des obligations de moyens et de transparence pour lutter contre la manipulation de l’information. Le Conseil a entretenu un lien étroit avec ces acteurs pour préparer au mieux la période électorale. Nos échanges avec nos homologues européens, notamment dans le cadre de l’ERGA, se sont poursuivis tout au long de l’année pour contribuer de près aux projets de textes portés par la Commission, en particulier la législation sur les services numériques (DSA) et la législation sur les marchés numériques (DMA). Dans le domaine de la lutte contre la haine en ligne, nos compétences ont été complétées par la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République. Enfin, notre mission de protection des publics, y compris et surtout les plus jeunes, dans la sphère numérique s’est notamment concrétisée par la mise en demeure de cinq sites pornographiques ne respectant pas l’obligation légale d’empêcher l’accès des mineurs à leurs contenus, conformément à la loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales. Le CSA a également signé le protocole d’accord porté par le Gouvernement sur la parentalité numérique, pour sensibiliser aux dangers de l’exposition aux écrans des enfants, en cohérence avec nos campagnes d’information et notre action relative à la signalétique jeunesse.
4. Enfin et surtout, 2021 s’est avérée être une année de profonds changements pour l’institution. Le collège du Conseil a été partiellement renouvelé, du fait des échéances prévues par la loi mais aussi du décès brutal et tragique de Michèle Léridon, unanimement appréciée au sein du CSA et bien au-delà par l’ensemble de ses confrères journalistes et ancien collègues de l’AFP. Sa disparition nous a tous profondément affectés.
Trois nouveaux membres nous ont rejoints l’année passée : Benoît Loutrel, Juliette Théry et Anne Grand d’Esnon. L’organisation de nos services a également été rénovée, notamment avec la création d’une direction des plateformes en ligne.
Bien évidemment, le chantier prioritaire de l’année 2021 était la préparation de l’Arcom, avec un intense travail de préfiguration mené dans un dialogue riche et confiant avec l’Hadopi, dont je tiens à remercier la présidente Monique Zerbib. L’adoption de la loi du 25 octobre 2021 relative à la régulation et à la protection de l'accès aux œuvres culturelles à l'ère numérique a concrétisé le rapprochement du CSA et de l’Hadopi et fourni l’assise législative aux missions du nouveau régulateur, l’Arcom.
2021 était donc une année de grandes transformations mais aussi de projection vers l’avenir. Je souhaite remercier à cet égard l’ensemble des membres et équipes du CSA pour ce bilan extrêmement riche, qui constitue sans doute le plus bel hommage que nous pouvions rendre à notre ancienne maison.
Depuis le 1er janvier 2022, l’Arcom déploie ses nouvelles missions au sein du paysage audiovisuel et dans la sphère numérique et incarne un modèle de régulation renouvelé, à l’écoute du secteur et des citoyens et inscrit dans le mouvement d’évolutions rapides du paysage. C’est donc une nouvelle page, passionnante et riche en défis, qui s’ouvre pour le secteur et le régulateur.
Roch-Olivier Maistre